Après avoir passé son enfance au milieu des Blue Mountains dans son Australie natale, Julia Jacklin a récemment sorti son premier album « Don’t Let The Kids Win » qu’elle dévoile aujourd’hui au monde entier par le biais d’une longue tournée mondiale entre Europe, Etats-Unis et Australie. Cette jeune sensation Country-Folk n’est pas qu’une simple héritière d’Angel Olsen. Elle nous démontre qu’elle a bien plus qu’une voix et pourrait vite se hisser très haut parmi les artistes incontournables du genre.
Pourrais-tu me dire d’où tu viens, comment as-tu commencé à faire de la musique ?
Julia Jacklin : Je viens des Blue Mountains en Australie. J’ai commencé à faire de la musique vers l’âge de 11 ans, juste à chanter, je ne jouais pas encore, puis la guitare vers 20 ans et… Je viens de sortir un disque !
Il paraît que la découverte de Britney Spears a déclenché ton intérêt pour faire de la musique, de quelle manière plus précisément ?
Julia Jacklin : J’écoutais beaucoup de musique avec ma mère quand j’étais petite, plutôt des comédies musicales avec Doris Day et ce genre de choses. Mais à 11 ans j’ai regardé un documentaire sur Britney Spears et c’est la première fois que je me suis rendue compte qu’il fallait travailler très dur pour accomplir quelque chose, et elle en avait déjà fait beaucoup au même âge. Ça m’a fait paniquer et j’ai commencé à prendre des cours de chant juste après.
Comment as-tu évolué vers une musique plus Folk qui est à des années lumières de Britney ? Tu t’es forgée une éducation musicale ?
Julia Jacklin : Oui, je suis allée dans une école de musique assez longtemps, principalement pour chanter. Mais je pense que la Folk est arrivée parce que c’est la musique la plus facile à comprendre, dans le bon sens du terme. C’est très accessible et tu n’as pas besoin d’avoir tout un tas d’équipement, d’une grande voix ou de chansons incroyables, juste une guitare pas chère. C’est un bon point de départ et facile de jouer seule ainsi. J’ai donc commencé un peu comme ça avec mes amis et nous avons continué ainsi.
Tu as pris des leçons de chant classique. Comment cela s’applique-t-il à la musique que tu fais aujourd’hui ?
Julia Jacklin : Je crois que ça m’a surtout permis d’apprendre à contrôler ma voix. C’est utile en tournée mais aussi pour trouver différentes manières de l’utiliser, même si je ne chante pas vraiment de la même façon aujourd’hui.
Tu voulais devenir travailleuse sociale et tu es maintenant auteure compositrice. Penses-tu que les deux ont un peu le même but d’une certaine manière, que cela aide les gens à se sentir mieux et à être plus heureux dans leurs vies ?
Julia Jacklin : Mmm… Oui, je crois, mais je pense que la musique démarre d’une façon plus égoïste cependant et que ça le reste longtemps, sans connotation négative, mais quand tu commences à faire de la musique tu ne vois pas la réaction des autres parce que généralement tu n’es pas encore très bon et tu ne joues pas si souvent. Il faut faire ça tout seul assez longtemps à l’inverse d’un travail social qui implique d’être avec les gens. J’aimerais dire que je me sens plus ainsi que musicienne, mais peut-être que les deux ont en effet un but similaire.
Et à quel moment as-tu fait ton choix ?
Julia Jacklin : Quand j’ai terminé l’université où j’avais justement étudié dans le domaine social j’ai voulu m’accorder deux années pour essayer de faire de la musique afin de voir si ça pouvait marcher, et c’est ce que je fais toujours aujourd’hui !
Avant de sortir ton disque tu faisais partie d’un groupe qui s’appelait Salta. Pourquoi as-tu décidé de continuer en solo, tu ne voulais pas continuer cette aventure avec le groupe ?
Julia Jacklin : Non, en fait nous voulions tous nous séparer et faire notre propre musique. Ce que nous faisions ensemble n’était pas très bon… Comme nous écrivions tous nous voulions inclure un peu des chansons de chacun, du coup l’ensemble n’était pas très cohérent. Mais maintenant je joue dans un groupe avec les mêmes personnes, mais c’est très différent et beaucoup mieux, donc d’une certaine façon nous jouons encore ensemble.
Comment as-tu formé le groupe qui tourne avec toi aujourd’hui et quelle est l’importance de cette collaboration pour toi ?
Julia Jacklin : Je suis allée au lycée avec le bassiste et le guitariste. C’est bien, ce sont mes meilleurs amis, c’est un bon environnement de travail.
Après avoir composé ton album tu as signé chez Polyvinyl Records ? Comment est-ce arrivé ?
Julia Jacklin : C’était grâce au festival South By Southwest (aux Etats-Unis, ndlr), après avoir joué là-bas. Passer là-bas fut quelque chose d’assez fou, et je ne m’attendais pas à ce que ce soit aussi productif.
“Don’t Let the Kids Win” a été décrit comme « l’examen intime d’une vie en cours ». Peux-tu m’expliquer ça un peu mieux, ou me dire ce qui a inspiré l’album ?
Julia Jacklin : Je pense que le thème général c’est le fait que tu ne contrôles que très peu de choses dans ta vie et il est inutile de se stresser ou d’être déprimé par ces choses-là. Je m’en suis rendue compte en passant de l’adolescence à mes 20 ans. Quand j’étais ado je voulais me forger une personnalité, je me disais que si je m’entraînais, que je lisais les bons livres et que j’allais voyager dans les bons endroits, que je fréquentais ou que je sortais avec les bonnes personnes, je pourrais créer une meilleure version de moi-même. Puis je me suis rendue compte que ça ne fonctionnait pas vraiment ainsi, il y a plein de choses que tu ne contrôles pas. Il faut travailler bien plus dur que ça pour réussir et pour être une bonne personne. Quand tu es plus jeune tu ne mesures pas tout cela.
Et ressens-tu une certaine peur de vieillir et de ne pas en avoir le contrôle ?
Julia Jacklin : Oui, certainement. Et je crois que c’est un sentiment humain normal, vieillir et s’inquiéter de ne pas obtenir autant de la vie que ce tu espérais en étant plus jeune. Mais j’essaie de ne pas y penser, je continue à aller de l’avant.
En général tu écris tes textes avant de composer la musique ?
Julia Jacklin : Oui, j’écris en général les paroles quand elles me viennent à l’esprit en ballade par exemple, je les enregistre sur mon téléphone ou je les écris dans mon journal. Ensuite je prends ma guitare pour mettre ça en forme, mais ça commence toujours avec les paroles.
Et ces chansons ont été écrites pendant une longue période, puisqu’il s’agit de ton premier album ?
Julia Jacklin : Oui, je dirais pendant les trois dernières années. Et puis j’avais fini d’enregistrer cet album un an avant de le sortir, donc ça commence à remonter.
Tu travailles déjà sur des nouvelles chansons ?
Julia Jacklin : Oui, j’ai quelques morceaux en cours.
Et tu as le temps d’écrire en tournée ?
Julia Jacklin : Pas vraiment, mais je rentre bientôt chez moi, donc j’espère avoir un peu plus de temps!
Et de quoi parle la chanson ‘Leadlight’ ?
Julia Jacklin : Elle a été inspirée par la fin d’une relation, le sentiment d’euphorie et les choses positives qui peuvent en ressortir. Tu te rends compte que les deux parties sont de bonnes personnes et vont continuer à en être, qu’elles deviendront même probablement meilleures suite à la fin de cette relation, qu’elle a été constructive, ce qui est une bonne chose.
Tu as aussi réalisé le clip de cette chanson, c’est important pour toi de t’impliquer dans cet exercice ?
Julia Jacklin : Oui, ça l’est. J’ai une idée assez claire de ce que je veux donc ça a du sens de m’impliquer. A l’époque où j’écrivais je n’avais pas assez de temps donc je voulais le faire ensuite.
Et tu aimerais réaliser des clips pour d’autres artistes ?
Julia Jacklin : Peut-être un jour… Quand j’aurais plus de temps !
Tu as enregistré l’album en Nouvelle-Zélande avec Ben Edwards, comment l’as-tu rencontré ?
Julia Jacklin : J’avais un album de la chanteuse néo-Zélandaise Aldous Harding que j’adorais et qu’il avait produit, donc je lui ai envoyé un email pour lui demander s’il voudrait produire le mien. Il m’a dit « oui, tu devrais venir chez moi trois semaines ». C’est ce que j’ai fait, et il a été super.
Et j’imagine que c’est un très bel endroit pour enregistrer ?
Julia Jacklin : Oh oui, c’était un endroit magnifique, très calme, avec un port, c’était vraiment parfait.
Et tu as abordé l’enregistrement différemment de ce que tu faisais avec ton ancien groupe ?
Julia Jacklin : J’imagine que oui, mais il s’agissait vraiment des premiers vrais enregistrements que je faisais donc j’apprends encore, il faut essayer pour voir le résultat. Je crois que rien n’est écrit à l’avance, cet exercice comporte encore pas mal de parts de mystère pour moi, et j’aime ça.
On t’a évidemment collé pas mal de comparaisons à la sortie de ton album, dont celle avec Angel Olsen qui est récurrente. Est-elle une véritable influence pour toi ?
Julia Jacklin : Oui, ça ne fait aucun doute. Father John Misty également, Fiona Apple encore plus, mais aussi Leonard Cohen ou Gillian Welch. Ce sont probablement mes principales influences.
Tu appréhendais la sortie de ton premier album ?
Julia Jacklin : Oui, je me sentais très nerveuse, mais maintenant il est sorti et les gens semblent l’aimer, c’est un gros soulagement.
Tu es au beau milieu d’une longue tournée mondiale en ce moment, comment gères-tu le fait de voyager, et comment prends-tu soin de ta voix et de toi-même ?
Julia Jacklin : Oui, ça fait environ trois mois que je suis en tournée, je ne suis tombée qu’une fois malade mais globalement je me sens plutôt bien, ça va même en s’améliorant. Il faut surtout boire autant d’eau que possible et ne pas sortir tous les soirs après les concerts et se laisser emporter!
Propos recueillis à Paris le mercredi 2 novembre 2016.
Un grand merci à Julia Jacklin, Marie-Julie Dahou pour avoir rendue cette interview possible, ainsi qu’à toute l’équipe de Pias France.
Pour plus d’infos :
Lire la chronique de « Don’t Let The Kids Win » (2016)
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