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EUGENE MCGUINNESS – Interview – Paris, samedi 9 février 2013

Son dernier album s’appelle ‘The Invitation To The Voyage’, et c’est justement à l’occasion de son voyage en France, une tournée d’une dizaine de dates, que nous avons eu le plaisir de rencontrer Eugene McGuinness, peu avant son concert à la Maroquinerie à Paris. Un entretien au cours duquel celui-ci nous parle de ses débuts et de son évolution dont ressort une volonté claire de ne pas se regarder le nombril et d’aller de l’avant. Mais aussi, entre autres, de ses nombreuses reprises, de Miles Kane, et de lancer de télés !

EUGENE MCGUINNESS - Interview - Paris, samedi 9 février 2013

Peux-tu me parler de tes origines, où tu as grandi, comment tu as commencé la musique ?

Eugene McGuinness : Je suis né dans la banlieue Est de Londres, à Leytonstone. J’y ai grandi mais mes parents sont Irlandais donc j’ai passé une grande partie de mon enfance entre l’Irlande et Londres. A 17 ans je suis parti à Liverpool et c’est là que j’ai commencé à jouer. Je jouais juste tout seul avant de commencer avec des groupes locaux de Liverpool et Manchester. C’est là que j’ai fait mes armes de musicien. Domino Records m’a découvert vers l’âge de 19 ans. J’ai d’abord sorti un EP puis d’autres ensuite. Depuis environ 5 ans je suis de retour à Londres, et les choses sont donc arrivées graduellement, de façon très naturelle. En général ça ne se passe pas comme ça quand tu signes avec un label. Tu enregistres un album et soit tu deviens énorme soit tu te fais jeter, mais ni l’un ni l’autre ne me sont arrivés!

Beaucoup de temps s’est écoulé entre ton précédent album et celui-ci, comment cela se fait-il?

Eugene McGuinness : Après le dernier album j’ai vu une routine se mettre en place. J’étais assez heureux de pouvoir sortir des disques à petite échelle, mais je ne voyais pas vraiment de progrès dans ce que j’écrivais et ce que je faisais en général. J’ai donc voulu prendre le temps de m’y mettre correctement. Donc cela a pris peut-être un peu plus de deux années. Et je me suis vraiment détendu, c’était planifié, sinon je serais retombé dans le même schéma. Je ne voulais pas continuer à sortir des disques de cette manière. Je voulais progresser, c’est ça qui te fait sentir bien. Je voulais que les choses soient différentes mais que cela se fasse naturellement, rien de radical. Je n’allais pas sortir un album de Rap! J’ai pris mon temps, j’ai fait d’autres choses, et j’ai pu le construire ainsi très lentement, parce que je savais que ce nouvel album allait être le projet qui me ferait aller de l’avant en tant qu’artiste. Je ferai donc d’autres disques dans cet esprit, contrairement à ce que je faisais auparavant.

Je trouve qu’il y a une influence assez forte des années 80 sur ton album, un son plus ‘gros’, plus dansant, assez différent de ce que tu faisais auparavant, qu’est-ce qui a déclenché tout ça?

Eugene McGuinness : Je ne pensais pas vraiment à une période spécifique, bien qu’il y ait eu de bonnes choses dans les années 80. Si je devais penser à une musique de cette époque ce serait probablement Prince, avec l’utilisation de boîtes à rythmes 808 ou de claviers Fairlight. Mais je trouve que l’album s’équilibre plus autour d’une guitare Surf et d’une orchestration plus large. Je voulais qu’il sonne comme un album moderne sorti en 2012. Je ne voulais pas qu’il soit trop rétro, trop 80’s ou futuriste. Je voulais qu’il représente avec honnêteté ce que je suis. Il y a plusieurs influences qui sont là qui entrent un peu en collision, mais je pense que c’est ça qui est intéressant.

EUGENE MCGUINNESS - Interview - Paris, samedi 9 février 2013D’ailleurs tu as choisi d’utiliser le thème de Peter Gunn sur ‘Shotgun’, comment est venue l’idée?

Eugene McGuinness : Je voulais essayer quelque chose où je n’écrivais pas la chanson, pour y apporter un peu de renouveau, de fraîcheur. Je voulais voir ce que ça ferait de voler une chanson que j’aime et de chanter dessus. J’ai entendu ‘Murder Weapon’ de Tricky (une reprise ‘revisitée’ d’un hit dancehall du chanteur jamaïcain Echo Minott, ndlr) et comme lui j’ai vraiment eu envie de prendre ce riff, ce son. Je ne voulais pas que ça sonne pareil, parce je savais que ça n’avait aucun intérêt. Je ne me suis pas non plus posé de questions sur la propriété du morceau, je voulais juste m’amuser avec cet air dans le studio. Ca n’était même pas grave que le morceau soit ensuite publié ou non, je voulais juste voir ce que je serais capable de créer en studio avec, pour mon propre amusement. C’est donc ce que nous avons fait et j’étais même surpris que ça finisse sur l’album et devienne un single.

Il n’y a pas eu de problèmes de droits d’auteur?

Eugene McGuinness : Non, on a demandé et ça n’a pas posé de problème. Mais franchement c’était surtout pour se faire plaisir. C’est ainsi que je veux aller de l’avant. Je ne m’en rendais pas compte en le faisant parce que je me faisais juste plaisir, mais c’est devenu une chanson importante pour moi, ça m’a ouvert un boulevard. On n’a pas toujours besoin de tout faire, parfois c’est fun de piquer aux autres, c’est beaucoup moins sérieux! (rires)

En parlant de reprises, il semble que ce soit un exercice que tu apprécies particulièrement, puisque tu as notamment repris récemment Lana Del Rey, Ian Brown… C’est quelque chose que tu aimerais faire plus souvent?

Eugene McGuinness : Je le fais déjà! Dès que je répète avec le groupe on fait plein de reprises. On en a fait une de Scott Walker juste avant Noël qui sortira bientôt je pense. Mais c’est quelque chose que l’on fait de toute façon en privé, en répétition. Il faut que les gens sachent à mon sujet que la musique c’est ce que je fais tout le temps. En dehors des nouvelles chansons ou des clips, c’est comme ça que je m’occupe. Avec le groupe on a fait des tas de reprises qui parfois sonnent vachement bien et d’autres fois… C’est de la merde! Mais ça n’a pas d’importance, il s’agit surtout de continuer à aller de l’avant. Le label nous avait d’ailleurs demandé de faire une reprise et je leur ai dit « Vous plaisantez, on en a au moins un vingtaine déjà! » Donc oui, on a fait ‘Blue Jeans’ de Lana Del Rey, mais on aurait pu en faire beaucoup plus… Et nous le ferons! J’adore chanter, ça n’a pas d’importance qu’il s’agisse de mes chansons ou de celles d’autres personnes.

Et pourquoi as-tu appelé cet album ‘The Invitation to the Voyage’?

Eugene McGuinness : Je ne m’en suis pas rendu compte en l’enregistrant, mais quand je regarde en arrière je m’aperçois qu’il fait toujours référence aux voyages, au mouvement : « Allons ici, ou là-bas, etc ». J’ai toujours voulu que ça sonne bien en voiture, ou dans le train, parce que c’est là que j’écoute de la musique. Quand je fais ça en voyage, en train ou en avion, avec la musique sur mes oreilles, je ne fais plus attention à ce qui se passe autour de moi. Je suis comme un labrador qui regarde par la fenêtre, et je suis content! Je voulais que ce soit pareil pour les autres.

Tu as passé beaucoup de temps sur la route avec Miles Kane, comment s’est alors passée l’écriture de ce nouvel album. Etait-ce justement sur la route, avant, après?…

Eugene McGuinness : Quand j’ai accepté de rejoindre le groupe de Miles Kane en tournée, j’avais enregistré à peu près la moitié de l’album. l’autre moitié s’est plutôt construite peu à peu pendant mes jours de congés. Et on n’en avait pas tellement! Pendant un an et demi on a tourné partout. A chaque fois que je rentrais à Londres pour quelques jours j’écrivais ou j’allais au studio. Mais je savais déjà quoi ce disque allait ressembler. J’en avais déjà fait une bonne partie au moment de rejoindre Miles Kane, et ça aurait pu être tentant de le terminer en vitesse, mais j’ai préféré prendre mon temps pour m’assurer que l’autre moitié serait meilleure. Et c’est ce que j’ai fait, et Miles m’a donné la possibilité d’écrire beaucoup, de prendre du plaisir à jouer dans son groupe et d’assembler ainsi les pièces de mon puzzle, très lentement.

Et qu’as-tu appris en tournant avec lui?

Eugene McGuinness : Le professionnalisme. Ca sonne un peu ennuyeux de dire ça, et aussi trompeur parce qu’on s’est vraiment beaucoup amusé. Mais je suis très fier de la discipline que je me suis imposé, de l’idée de se dire que le concert suivant peut être encore meilleur. J’ai vraiment beaucoup appris, mais ce n’est pas simplement grâce à Miles – qui est incroyable – mais aussi par le groupe et toute l’équipe. Un groupe merveilleux de gens très étranges qui font le tour du monde ensemble. J’ai appris de chacun d’entre eux.

Et penses-tu que cela a aussi eu une influence sur ton écriture?

Eugene McGuinness : Pas tellement. C’est mon truc à moi. J’ai commencé à écrire à 15 ou 16 ans. L’expérience que tu vis se reflète dans l’écriture mais pas le style ou l’approche musicale, parce qu’ils sont bien personnels. Mais j’ai vu beaucoup de choses en faisant le tour du monde, c’est définitivement une source d’inspiration.

EUGENE MCGUINNESS - Interview - Paris, samedi 9 février 2013L’album a été produit par Clive Langer et Dan Carey. peux-tu me parler un peu de votre travail ensemble?

Eugene McGuinness : Ce sont deux personnes très différentes. Clive est la personne avec qui j’ai fait le gros du disque, surtout au début. Il est bien plus vieux que moi, il est très sérieux et dès que je l’ai rencontré il m’a dit quelles étaient les choses qu’il n’aimait pas et que moi j’aimais, et je me suis dit « OK… Connard! ». Puis il m’a parlé des choses qu’il aimait; plus que les autres d’ailleurs, et c’était vraiment très utile, très inspirant, parce qu’il m’a imposé une certaine discipline comme je fais plein de choses différentes, alors il me disait : « Regarde, il n’y a que ça de bien là-dedans, ça c’est ennuyeux, ça c’est bizarre… ». Il était super, et maintenant c’est un très bon ami. Voilà en ce qui concerne le songwriting. Dan Carey est arrivé quant à lui à la fin. Il a une approche plus pop, avec l’idée de passer un bon moment ensemble, ce qui était également utile, parce qu’une fois que Clive en a eu fini avec moi j’étais prêt à entrer en studio avec un magicien comme Dan. Il est épatant, on s’est vraiment bien amusé avec tous ses outils dans le studio. Il savait que je voulais que l’album ait un côté reluisant et comment adapter tout ce que je désirais avec une production moderne. Clive savait pour sa part ce que je voulais en terme d’écriture, parce qu’il a déjà travaillé avec Morrissey, Elvis Costello, David Bowie… Bref, ils sont tous les deux été super mais très différents!

Avec le concert à la Maroquinerie tu termines ton « Tour de France ». Comment cela s’est-il passé jusqu’ici?

Eugene McGuinness : Je me sens comme Bradley Wiggins ! (sourire)… Non, vraiment ç’a été super, mieux que ce que j’imaginais. Toutes les dates se sont bien passées. je n’avais encore jamais fait une tournée où tous les concerts étaient réussis. J’ai déjà fait une tournée française avec Miles Kane donc je savais à peu près à quoi m’attendre. Mais faire mes propres shows, c’est un moment important dans ma vie. Je ne peux pas faire comme si de rien n’était, ça m’a laissé une forte impression. D’une certaine manière je ne m’y attendais pas, je pensais que ce serait une tournée agréable avec quelques bons concerts.

Alors que là tu fais des concerts complets…

Eugene McGuinness : oui, ‘that’s fucking great’! Ca ne m’est jamais arrivé avant, c’est nouveau pour moi! Je peux juste faire ça à Londres, mais dans différentes villes françaises, c’est incroyable.

Sur les tournées de Miles Kane tu jouais de la guitare. Qu’en est-il de tes propres concerts? En joues-tu encore beaucoup ou préfères-tu te concentrer sur le chant?

Eugene McGuinness : Je ne joue pas tellement de guitare sur cet album, mais pour le suivant on en joue plus ainsi que du piano, on essaie de garder un côté ‘Roots’. Sinon oui, j’en joue pas mal. Je me suis amélioré après avoir joué avec Miles Kane. Quant il m’a embauché je lui ai dit « Tu sais, je ne suis pas si bon que ça », mais il s’en fichait! Mais maintenant je suis devenu plutôt bon. J’apprends beaucoup de mon frère et de mes amis. On apprend en permanence, c’est ça le truc pour s’améliorer et se diversifier. Pour moi c’est toujours le chant qui a compté le plus, mais la guitare et le piano sont des choses grâce auxquelles je l’apprécie encore plus. Quand tu sais faire quelque chose de nouveau tu veux le montrer dans tes chansons, donc c’est bon pour tout.

Et voici ma dernière question : j’ai vu une photo de toi dans le NME, jeter une télé par la fenêtre pour un concours de ‘lancer de télé’ dans le cadre de l’émission Indé anglaise qui s’appelle This Feeling TV. C’était quoi ça? Tu t’es sentis comme une Rock Star à ce moment précis?

Eugene McGuinness : Ahah! Non je me suis senti comme un idiot! Ce programme c’était fun mais… C’était bizarre! Est-ce que les gens jettent des télés par la fenêtre? Elles sont trop bien pour ça maintenant! Je dois dire que je ne suis pas tellement Rock ‘n’ Roll. Je préfère allumer la télé et regarder ‘Come Dine with Me’ (une émission de téléréalité culinaire britannique diffusée sur Channel 4, ndlr) ou bien les infos! (Rires) Voilà ce que je préfère faire avec une télé! Si quelqu’un de Rock ‘n’ Roll entrait dans ma chambre d’hôtel et jetait ma télé par la fenêtre je ne serai vraiment pas content! Je ne suis pas vraiment fait pour ça! Donc ça n’était pas quelque chose de très naturel, je n’avais pas vraiment envie de le faire!

Propos recueillis à Paris le samedi 9 février 2013.

Crédits photos : Dean Rogers / David Servant (live à la Maroquinerie)

Un grand merci à Eugene McGuinness ainsi qu’à toute l’équipe de Domino France pour avoir rendue cette interview possible.

Pour plus d’infos :

Lire la chronique de ‘The InvitationTo The Voyage’ (2012)

Galerie photos du concert à la Maroquinerie, Paris, 09/02/2013

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