Jesca Hoop a pris son temps avant de vraiment se lancer dans une carrière musicale, pas avant l’âge de 27 ans. Elle a certainement pris la bonne décision, car il aurait été fort dommage de passer à côté de ses compositions audacieuses et variées dont la France va enfin pouvoir profiter en découvrant très prochainement son nouvel album, ‘Hunting My Dress’, dont la sortie est prévue le 3 mai prochain.
Tu as rejoint le festival Les Femmes S’En Mêlent à la dernière minute en remplacement de Dag For Dag. Connaissais-tu ce festival et son principe auparavant?
Jesca Hoop : Non, je le découvre!
C’est donc la première fois que tu viens jouer en France? Comment trouves-tu ton nouveau public?
Jesca Hoop : C’est vraiment bien! C’est intéressant parce que mes chansons reposent beaucoup sur les textes, et je ne sais pas à quel point les gens vont comprendre mes histoires. Donc j’espère vraiment que c’est quelque chose que je vais pouvoir faire passer! Mais jusqu’ici le public a été super!
Tu as joué dans d’autres villes pour le festival avant Paris?
Jesca Hoop : Oui, nous sommes ici pour quatre dates, j’en ai déjà fait trois.
Tu es une chanteuse américaine, mais tu es installée aujourd’hui à Manchester, est-ce un choix artistique?
Jesca Hoop : D’une certaine manière, oui. C’était en tout cas une ambition. Je voulais travailler au Royaume-Uni et en Europe, dans un circuit plus petit que les USA pour un moment. Et je n’avais sorti qu’un disque de l’autre côté de l’Atlantique, donc le moment était venu, et je suis heureuse d’avoir élargi mes horizons.
Penses-tu que ton installation au Royaume-Uni a eu une influence sur ton écriture?
Jesca Hoop : Oui, certainement. ‘Hunting My Dress’ a été écrit à Los Angeles, mais le fait d’avoir bougé m’a permis de grandir, d’évoluer.
Du coup tu te sens un peu plus proche de la scène britannique aujourd’hui?
Jesca Hoop : Je ne sais pas! J’espère que non. J’espère que ça correspond simplement à mes besoins. Mes influences viennent de partout, et mon écriture me permet aussi de rester proche de chez moi d’une certaine façon.
Tu as grandi aux Etats-Unis dans une famille Mormon, était-ce différent du point de vue de ton éducation musicale?
Jesca Hoop : Oui, j’avais seulement la musique que mes parents me laissaient écouter et la radio. Quand j’ai quitté ma famille une fois adulte, il y avait tellement de musique à découvrir! Beaucoup de Pop et de Rock notamment. Aujourd’hui encore il y a des choses que mes amis sont surpris ou heureux de me faire découvrir, parce que pendant toute mon enfance j’ai été ‘protégée’ de toute cette culture populaire.
Finalement aujourd’hui encore tu découvres beaucoup de choses?
Jesca Hoop : Oui. Mais il y a une chose que j’ai retenue de mon enfance, ce sont les chorales. C’est quelque chose que j’écoutais et qui a encore une influence sur la musique que j’écris aujourd’hui.
Tu as commencé ta carrière musicale assez tard, vers 27/28 ans. Pourquoi as-tu fais ce choix finalement?
Jesca Hoop : J’ai essayé beaucoup de choses avant, par exemple j’ai travaillé à la ferme, fait de la charpenterie, je me suis occupée de personnes handicapées, de personnes défavorisées aussi… Et je me suis rendue compte que c’est dans la musique que j’étais la meilleure, et que c’était ce qui me faisait le plus vibrer également. Donc je me suis lancée!
Sur ce nouvel album tu chantes une chanson avec Guy Garvey d’Elbow. Comment vous-êtes vous rencontrés?
Jesca Hoop : Il m’a appelé pour faire une interview. Un de ses amis lui avait donné une compilation sur laquelle il y avait une de mes chansons. Donc il a réussi à me retrouver, probablement par internet j’imagine, pour cette interview. J’ai raté deux de ses appels et la troisième fois, j’étais dans mon bain! Donc on a fait une interview ‘Over The Bath’!
Cela a eu des conséquence sur la suite. tu as fais les premières parties d’Elbow. Comment était-ce de se retrouver subitement face à une grosse audience?
Jesca Hoop : C’était quelque chose dont j’avais un peu l’habitude donc ça s’est bien passé. En fait la première fois que j’ai joué devant un public très nombreux, c’était en première partie de Mark Knopfler de Dire Straits, et là c’était intimidant, parce que j’étais toute seule devant 9 000 personnes ! Je pense que ça m’a ‘construite’ en tant que qu’artiste de scène, et depuis lors je m’y suis vraiment habituée, donc aujourd’hui tout va bien, ce n’est plus un problème!
‘Hunting My Dress’ est ton deuxième album, dirais-tu qu’il y a de grosses différences avec le premier ?
Jesca Hoop : Oui, il y a moins ‘d’information’ sur ce disque. C’est à peu près similaire en terme de production mais il y a moins d’instruments et du coup plus d’espace. Mais pour moi c’est aussi intéressant et surtout aussi riche. Ce disque est un peu moins schizophrène, même s’il l’est encore un peu, car j’aime bien jongler entre les styles au fil et parfois même à l’intérieur des chansons. Ses multiples facettes ne sont pas aussi marquées que sur le premier.
Tu as enregistré tes deux albums avec Tony Berg, peux-tu m’en dire un peu plus à son sujet et sur votre travail ensemble?
Jesca Hoop : Tony a très bon goût! C’est une très bonne influence pour moi! Il n’a pas une approche commerciale de la musique, ce qu’il veut faire ressortir, c’est l’art! Il peut être très dur avec moi aussi parfois, mais tout cela a été très positif pour moi.
J’ai écouté plusieurs chansons sur lesquelles se dégagent à mon avis quelques influences: Björk sur ‘Whispering Light’ notamment en raison des arrangements de voix, Radiohead sur ‘Feast Of The Heart’, pour sa mélodie à la guitare qui ressemble à celle de ‘I Might Be Wrong’, et Kate Bush sur ‘Angel Mom’… Qu’en penses-tu?
Jesca Hoop : Je dirais que tu n’as raison qu’au sujet de Kate Bush, sur ‘Angel Mom’, car j’ai effectivement été inspirée par son style, qui est quelque chose de naturel pour moi, mais aussi en terme d’arrangements et d’écriture. L’écouter a développé chez moi une certaine approche de la musique. Je crois qu’il y a des points communs entre nos voix, ou plus précisément dans nos intonations. En revanche sur ‘Feast Of The Heart’ il n’y a pas de guitare, il s’agit de deux basses.
Et quelle est la signification du titre ‘Hunting My Dress’?
Jesca Hoop : Il s’agit de l’abandon du passé.
Et y a t il des thèmes récurrents sur le disque?
Jesca Hoop : Oui, il y en a. La mort en occupe une grande partie, mais aussi la guerre… Il y a quand même quelques chansons d’amour sur l’album, c’est d’ailleurs quelque chose que je ne fais pas en général, donc c’est assez inhabituel de trouver des chansons d’amour sur mes disques. Donc : l’amour, le sexe et la guerre!
Propos recueillis le 29 mars 2010 à Paris.
Un grand merci à Jesca Hoop ainsi qu’à Mélissa Phulpin pour avoir rendue possible cette interview.
Pour plus d’infos:
Lire la chronique de ‘Hunting My Dress’
La Maroquinerie, Paris, lundi 29 mars 2010 : galerie photos / compte-rendu