Il n’aura fallu qu’une poignée d’EPs à Palace, groupe originaire de Londres, pour attirer l’attention des médias et d’un public avisé. Leo Wyndham (chant/guitare), Rupert Turner (guitare), Will Dorey (basse) : ces quatre amis ont régalé nos oreilles l’an dernier avec leur premier album « So Long Forever », un modèle de poésie Indie et de maturité dont trois d’entre eux nous ont parlé à l’occasion de leur concert parisien à la Boule Noire, le 20 mars dernier.
Pouvez-vous me parler un peu de l’histoire du groupe, d’où venez-vous et quand avez-vous commencé à jouer ensemble ?
Matt : Ça fait très longtemps que nous nous connaissons, nous sommes tous allés ensemble à l’école. Mais nous avons commencé le groupe assez longtemps après avoir quitté l’école. Deux d’entre nous étaient déjà ensemble dans un groupe, et les autres sur d’autres projets, puis nous avons débuté avec Palace juste pour nous amuser vraiment, et rien d’autre. Puis peu à peu les choses sont devenues plus sérieuses, et nous voilà ici !
Y a-t-il une histoire derrière le nom de votre groupe, Palace ?
Matt : Malheureusement pas vraiment non ! J’aurais aimé te dire qu’il y avait une histoire intéressante derrière tout ça, mais la réalité c’est que nous n’arrivions pas à trouver un nom, alors nous avons juste choisi ce mot là. Nous avons toujours pensé que nous en changerions assez vite, mais finalement ce n’est pas arrivé.
Le groupe a vu le jour en 2012 ?
Matt : Oui, 2012 c’est l’année durant laquelle nous avons commencé à répéter dans des studios pourris à Camden, Londres. On jouait juste pour le plaisir en se dépensant sur des improvisations de Blues qui pouvaient durer des heures. Il nous a fallu environ deux ans pour vraiment devenir meilleurs en tant que groupe. Puis le premier EP est arrivé en 2014, le second l’année suivante et enfin l’album en 2016.
C’était donc le temps nécessaire pour gagner en expérience, vous n’avez jamais eu le sentiment d’avoir dû attendre trop longtemps avant de sortir cet album ?
Will : Le temps pour préparer et sortir un album est bien plus long que ce que les gens peuvent imaginer donc c’était le temps nécessaire pour en arriver là où nous sommes, il est sorti au bon moment.
Rupert : Je pense que nous avons beaucoup appris sur le tas, au début nous pensions que ça serait beaucoup plus rapide que ça avant de nous rende compte de l’inverse.
Will : Ça Peut prendre des mois ou des années d’écrire un album, et autant pour l’enregistrer et ensuite finaliser les enregistrements, le promouvoir, planifier sa sortie, etc.
Matt : Je pense que l’on peut sentir une progression dans notre son du premier au second EP et ensuite sur l’album. Il y a une évolution dans les chansons, dans leurs sonorités. Ça nous a pris du temps de les développer et de déterminer à quoi nous voulions qu’elles ressemblent. Certaines chansons de l’album sont arrivées très tard, juste avant d’entrer en studio.
Et pensez-vous que le lieu où vous avez grandi a eu une influence sur l’univers sonore que vous alliez développer, car les villes anglaises ont souvent des identités musicales très marquées, comme Manchester ou Bristol par exemple.
Matt : Pour être honnête pas vraiment parce que nous venons de la campagne, du Dorset, pas si loin au Sud de Bristol en fait. Bien sûr il y a un héritage musical très riche dans les différentes villes du pays, mais à l’école où nous sommes allés c’était plutôt varié, il y avait beaucoup d’opportunités différentes si l’on voulait s’impliquer dans la musique.
Will : Mais ensuite c’est effectivement à Londres que notre musique a vraiment pris forme, cette ville grouille tellement de gens et de bonne musique qu’il est plus facile d’être inspiré là-bas j’imagine.
J’ai vu que vous faisiez souvent référence au Blues dans votre musique, quels sont les artistes qui vous ont influencés et donné envie de devenir musiciens ?
Rupert : Je crois que chacun de nous a des influences différentes mais il y en a définitivement certaines sous-jacentes telles que Jeff Buckley.
Matt : Oui, nous avons beaucoup écouté de Soul et de Blues, mais comme le disais Rupert certainement Jeff Buckley pour le son des guitares, il a toujours été une idole pour nous, avec sa voix aussi bien entendu. Mais nous avons beaucoup d’autres influences : The Maccabees, Tame Impala, Foals, ce genre de choses modernes mais aussi d’autres plus Folk comme Fairport Convention ou Van Morrison, c’est assez large en fait. Et beaucoup de musiciens de Blues ont travaillé dans le studio où nous avons enregistré, des saxophonistes, des trompettistes, des musiciens incroyables qui ont fait qu’il y a une influence Blues dans notre musique qui vient du studio. Les premières chansons que nous avons créées étaient sans aucun doute enracinées dans le Blues.
Et aujourd’hui cela reste un élément fort dans l’identité du groupe ?
Matt : Je pense, oui.
Rupert : Mais je pense aussi qu’on s’en éloigne tout en gardant des touches de Blues qui vont et viennent, car beaucoup de notre musique n’en est pas, c’est juste la racine.
Vous avez sorti votre album chez Fiction Records qui comprend des groupes indés majeurs tels que Elbow ou les Maccabees, comment êtes-vous arrivés chez eux ?
Matt : Nous avons rencontré beaucoup de labels, et nous avons trouvé Fiction vraiment cool. Les gens étaient vraiment sympas, sans donner le sentiment qu’il s’agissait juste d’un business mais plutôt de fans de musique. Et les groupes du label sont vraiment bons aussi, donc ce fut une décision plutôt facile pour nous, et ça se passe très bien.
En parlant des Maccabees justement, vous avez été beaucoup comparés à eux, trouvez-vous cette comparaison juste ?
Rupert : Il y a de ça mais leur musique est beaucoup plus frénétique que la nôtre.
Matt : Je pense qu’il y a des éléments émotionnels qui nous rapprochent d’eux. Ça reste très flatteur pour moi parce que j’adore les Maccabees.
Comment se passe l’écriture au sein de Palace, c’est un effort en commun ?
Will : En général l’un de nous arrive avec une idée et l’apporte au reste du groupe. A partir de là nous essayons de la développer ensemble, on essaie d’impliquer tous les membres, autant que possible.
Et comment s’est passé l’enregistrement de l’album avec Adam Jaffrey ?
Matt : C’était fun… et difficile ! On a cru tomber fou parfois parce que ça a pris beaucoup de temps, mais je crois que ça nous a rendus plus forts et meilleurs musiciens aussi. C’était une très bonne expérience mais vraiment intense.
Will : Ça nous a pris trois mois, et c’était tous les jours, parfois de 10h du matin à 2h du matin le lendemain. Il y a des semaines où nous faisions ça 5 jours de suite.
Rupert : C’était un studio relativement petit qui pouvait nous rendre un peu claustrophobes!
Will : Et quand tu sortais c’était l’hiver donc il faisait trop froid dehors, il fallait rester à l’intérieur avec un bruit constant ou alors geler dehors !
C’était une étape importante pour vous, parce que vous aviez produit vous-mêmes vos EPs auparavant ?
Matt : Oui, enfin Will était celui qui s’occupait de ça.
Vous pouvez vraiment sentir une différence dans le son ?
Matt : Oui, sans aucun doute, on peut entendre la différence.
Will : Les EPs ont une sonorité plus « fait maison », comme si les prises avaient été faites avec un seul micro plutôt qu’une table de mixage.
Matt : Évidemment Adam Jaffrey fait ce métier depuis longtemps et il a pu nous apporter des idées intéressantes. Par exemple il y a un aspirateur sur « Break The Silence » parce que le son qu’il émet est dans la bonne tonalité ! Juste une seule note que l’on peut entendre en arrière-plan. Mais il y avait plein d’autres trucs cool qui peuvent paraître assez ridicules, nous avons mis un tournevis entre les cordes de guitare, ça donne un son complètement fou, avec un effet de Delay en plus. Et puis nous avons utilisé le même appareil de reverb que Led Zeppelin sur leurs albums I & II parce qu’il était là, dans le studio. Donc Adam nous a apporté toutes ces choses auxquelles nous n’avions pas pensé par nous-même, nous avons beaucoup appris tout au long de cet enregistrement.
Avez-vous choisi « So Long Forever » pour une raison particulière ?
Matt : Nous ne nous en étions pas rendu compte avant, ni pendant l’enregistrement, mais après nous nous sommes aperçus que le thème inconscient de l’album c’était surtout la perte, et l’ambiance générale est assez triste également. Dans cet esprit le choix de ce titre est plutôt bon, comme une façon de dire au revoir, mais c’est aussi notre chanson préférée sur l’album, nous adorons la jouer, donc c’était un choix plutôt évident.
Et la pochette de l’album a été réalisée par Wilm Danby, pouvez-vous me parler de cet artiste ?
Rupert : Il sera au concert ce soir !
Matt : En fait c’est le frère de Leo (le chanteur, ndlr).
Rupert : Et à l’origine c’était notre bassiste !
Matt : Oui, il a commencé à la basse avec nous avant de partir pour se concentrer sur son art. Le nom du groupe, Palace, était également son idée. Nous lui devons beaucoup !
La pochette représente-t-elle le groupe ?
Matt : Non, pas vraiment. Le personnage principal c’est son autoportrait, et les autres sont des personnages ‘mystérieux’ !
Will : Ça peut être qui tu veux !
Matt : C’est dans l’ensemble assez abstrait, c’est son style, mais il y a des choses sur cette peinture qui représentent différentes parties de l’album comme la fumée en arrière-plan pour « Holy Smoke », le feu d’artifice pour « Fire in the Sky », ou le citron pour « Bitter » !
Et quels sont vos projets pour le reste de l’année ?
Matt : Beaucoup de festivals cet été à travers l’Europe et le Royaume-Uni. Nous avons aussi un nouveau clip qui va sortir pour « Bitter ».
Will : Et bien entendu nous allons travailler sur de nouvelles chansons pour le second album !
Propos recueillis à Paris le lundi 20 mars 2017.
Un grand merci à Palace, à Lisa Chappot et Sophie Vilain pour avoir rendue cette interview possible, ainsi qu’à toute l’équipe de Caroline International France.
Pour plus d’infos :
Lire la chronique de « So Long Forever » (2016)
La Boule Noire, Paris, lundi 20 mars 2017 : galerie photos
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