C’est dans le cadre pittoresque du Comptoir Général, dans le 10ème arrondissement de Paris, que nous avons rencontré Sarah Blasko, star en Australie qui, avec déjà trois albums à son actif, ne demandait qu’à découvrir de nouveaux horizons. Voici chose faite avec ‘As Day Follows Night’, sorti le 15 mars dernier en France, un pays qui n’a plus qu’à lui ouvrir les bras, à la hauteur de son talent….
Tu as sorti ton premier album solo en 2004 en Australie, mais pourrais tu m’en dire un peu plus sur tes débuts, quand comment as-tu commencé la musique?
Sarah Blasko : Je crois que je suis juste ‘tombée’ dedans! J’ai toujours aimé la musique étant enfant et j’ai eu une éducation plutôt religieuse, donc je suis beaucoup allée à l’église où il y avait de la musique. Et mon père écoutait beaucoup de musique. C’est ainsi que ma passion est née. Quand j’étais adolescente, je passais des heures à chanter dans ma chambre. J’ai plus ou moins commencé comme ça, sans trop y penser, c’est juste quelque chose que j’adorais faire. Je n’ai commencé à écrire des chansons et à jouer de la guitare que vers l’âge de 18 ans. Ensuite j’ai joué dans des groupes, notamment avec ma soeur, et je suis devenue de plus en plus accroc ! Mais je n’ai jamais eu de vraie formation, j’ai appris ‘à l’oreille’. Ca n’a jamais été planifié et j’aime la façon dont c’est arrivé. Je pense que la plupart de mes amis à l’école ne s’attendaient pas à ce que je fasse ça aujourd’hui, parce que je ne faisais pas partie de ceux qui chantaient et jouaient tout le temps à l’époque!
Tu as enregistré ton nouvel album avec Björn Yttling (de Peter, Björn & John) en Suède. Comment vous êtes-vous rencontrés?
Sarah Blasko : A l’origine je devais faire ce disque en Australie, mais après avoir passé un an à écrire chez moi et aussi à composer pour une adaptation de Hamlet au théâtre, j’ai pensé qu’il serait bon de partir un peu en voyage, faire un petit tour d’Europe. Et avant de partir j’ai décidé d’écrire à quelques personnes pour voir si elles seraient intéressées d’enregistrer mon disque. Björn Yttling m’est tout de suite venu à l’esprit. Je lui ai donc écrit une lettre assez comique dans laquelle je lui parlais de moi et de mes chansons. Il m’a dit qu’il avait trouvé cette lettre très drôle. J’ai donc décidé de le rencontrer quand je suis allée à Stockholm. Quelque chose en moi me disait que c’était la personne avec qui je devais travailler sur cet album. Je recherchais quelqu’un qui aimait la Pop, mais qui était aussi intéressé par faire cela d’une manière créative. Je trouve qu’il y a pas mal d’artistes Suédois qui font des choses intéressantes à l’heure actuelle, alors mon choix s’est porté sur lui pour ces différentes raisons.
C’est marrant, l’année dernière j’ai interviewé Anna Ternheim, dont il a produit le dernier album, et je trouve qu’il y a justement pas mal de ressemblances entre vos disques, notamment dans leur texture, les ambiances, les instruments utilisés…
Sarah Blasko : Oui, on m’a dit ça! Je pense que c’est l’une des caractéristiques de Björn. Quand on décide de travailler avec lui, on sait qu’il apporte une certaine qualité qui lui est propre. Je n’avais jamais entendu Anna Ternheim et il m’a fait écouter son album, puis ceux de Peter Björn & John et de Lykke Li. Je pouvais déceler les éléments qu’il y apportait, notamment au niveau des percussions. C’est certainement dans ce domaine qu’il m’a beaucoup apporté : les rythmes, les arrangements de cordes également, très simples et classiques.
Et comment était-ce de partir enregistrer en Suède, loin de chez toi?
Sarah Blasko : Je dois admettre que c’était assez difficile, particulièrement parce que c’était un disque difficile à réaliser pour plusieurs raisons. C’était probablement l’album le plus personnel que j’ai écrit. Je suis partie seule là-bas, et je jouais avec plein de gens que je ne connaissais pas – à l’inverse de mes précédents albums où j’enregistrais avec des personnes avec qui j’avais écrit ou qui faisaient partie de mon groupe. C’était très intimidant au début. Quand je suis arrivée là-bas je ne savais plus trop pourquoi j’avais pris cette décision, mais je pense que c’était un très bon challenge. Mais c’était vraiment bizarre de quitter la chaleur de l’Australie pour se retrouver dans un pays où il gelait et neigeait! C’était en février l’année dernière et il faisait vraiment très froid! Mais j’ay ai vraiment pris du plaisir, et je pense que ce sont le genre de choses qui font de ce disque ce qu’il est, dans le sens où c’est une oeuvre très solitaire. J’étais vraiment dans cet état d’esprit. Et puis c’était super de travailler avec des gens qui ont une approche différente de la musique , ne serait-ce que d’un point de vue culturel. Et puis les nombreux instruments utilisés, mais aussi leurs avis, tout cela a apporté une nouvelle saveur à ma propre musique, c’était une belle expérience.
A ton avis, pourquoi a-t-il fallu tellement de temps avant que l’un de tes albums ne sorte en Europe? L’occasion ne s’est jamais vraiment présentée?
Sarah Blasko : Non, il n’y a pas eu d’opportunité. Ce fut dur de trouver quelqu’un pour sortir mon disque. Le précédent est juste sorti au Royaume-Uni. Enfin ça fait longtemps que je voulais faire ça, mais c’est si difficile quand on est tellement loin, car ça demande du temps pour s’assurer que cela va aussi marcher dans d’autres pays. Mais je suis du genre à croire que les choses arrivent au bon moment. Ça a du sens pour moi que ce soit cet album en particulier qui sorte ailleurs. Il est plus simple que les précédents d’une certaine manière, plus évident.
Et peux-tu m’expliquer le choix du titre ‘As Day Follows Night’?
Sarah Blasko : Ça remonte à l’époque où j’écrivais la musique pour Hamlet, la pièce de Shakespeare. Il y a cette expression qui, je crois, est dans la pièce, ou en tout cas quelque chose du genre : « As sure as the night, the day ». Je voulais vraiment faire passer l’idée que lorsque l’on sort d’une grosse difficulté, une nouvelle vision de la vie et de nouvelles perspectives s’ouvrent. Je trouvais que beaucoup de mes chansons parlaient de ça, d’avoir un point de vue différent tiré de ses expériences qui permette de se sortir ainsi de ses problèmes. J’ai donc trouvé ce titre adapté. C’est une belle image tirée de cette pièce que je voulais surtout tourner dans le bon sens, « après la nuit, le jour » et pas le contraire!
Tu penses donc qu’avoir composé pour le théâtre a eu une influence sur tes choix ensuite?
Sarah Blasko : Oui je pense, car il m’a fallu écrire quelque chose de très simple. Dans Shakespeare il y a tellement de textes que la musique doit rester un support. Et je me suis rendue compte qu’une musique simple mais ‘forte’ a plus d’effet que des choses compliquées parfois. Cela a inspiré mon écriture. Cette ambiance ‘théâtrale’ a également eu de l’effet sur moi. Cette pièce est très complexe et comporte tellement de sentiments, l’amour, la vie et la mort, la culpabilité …
C’est aussi pour cela que tu as voulu revenir à des instruments plus ‘traditionnels’, par opposition à la guitare électrique, aux claviers…?
Sarah Blasko : Oui, le piano était le centre de l’album. A un moment j’en ai eu marre de tous ces instruments… C’est bien de pouvoir bidouiller et de s’amuser avec les sons, mais cette fois-ci je voulais que ça sonne vrai, naturel, comme un disque honnête et simple, à l’image des chansons.
En parlant des chansons, y-a-t-il des thèmes en particulier que tu aimes aborder?
Sarah Blasko : Je pense que c’est toujours lié avec ce qui se passe en moi. C’est un moyen d’exprimer tout ça, tes espoirs, tes rêves. Ce sont des choses liées à la réalité mais exprimées d’une manière plus fantastique. Cet album traite de la prise de conscience de sa force intérieure et d’avancer en ayant confiance en soi. De voir le bon côté des choses aussi. Mais je voulais aussi donner à ce disque un ton rêveur, et aussi lié aux comédies musicales sous certains aspects. C’est comme si on suivait le parcours d’un personnage, avec ses hauts et ses bas, le tout dans une ambiance qui peut être aussi bien enjouée que sérieuse.
J’ai également vu les très belles vidéos que tu as faites pour tes derniers singles. D’où viennent les idées? Qui se charge de la réalisation?
Sarah Blasko : Ça dépend. Parfois il s’agit de personnes que je connais et que je trouve créatives, avec d’excellentes idées, alors je leur confie le projet en leur disant ‘fais-ce que tu veux, je te fais confiance!’. Et puis il y a les autres, à qui je soumets mes idées. Mais j’aime être impliquée dans tout ça, parce qu’il faut que ça reflète ma musique. Parfois ça marche, d’autres fois pas du tout!
Sur tes précédents albums tu n’écrivais pas seule (avec Robert F. Cranny, ndlr), ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Ca fait également partie du changement que tu désirais?
Sarah Blasko : Oui, je savais que si je ne le faisais pas maintenant j’allais toujours le regretter. Ecrire seule est une expérience très différente. Mais les sujets abordés aussi, il fallait que ce soit quelque chose de complètement personnel. J’adore écrire avec d’autres personnes, mais je traversais une phase où j’avais besoin de savoir ce que mes propres idées donneraient seules. C’est dans l’enregistrement que s’est faite la collaboration cette fois-ci. C’était très sympa, tu écris des chansons, assez simples, et puis tu entres en studio et tout le monde essaie de les enrichir.
Tu as reçu plusieurs récompenses dans ton pays pour tes deux derniers albums. Qu’est-ce que ça fait de venir en Europe, et plus particulièrement en France où les gens ne te connaissent pas encore?
Sarah Blasko : C’est excitant!… et effrayant en même temps! Tu te dis que les gens sont intrigués de savoir qui tu es, à quoi ressemble ta musique… Il faut en passer par-là, par cette phase d’observation. J’ai la chance d’avoir une carrière en Australie, mais il arrive un moment où on se sent à l’étroit, c’est un grand pays mais la ‘planète musique’ est si vaste! Il y a longtemps que je voulais faire ça, et c’est passionnant de venir faire des interviews à Paris, tout est à proximité… et c’est romantique!
Un grand merci à Sarah Blasko, Damien Jouvenceau (So Cult) et au Comptoir général.
Pour plus d’infos:
Lire la chronique de ‘As Day Follows Night’
La Maroquinerie, Paris, jeudi 1er avril 2010 : compte-rendu / galerie photos
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