Mystérieuse, intrigante et surtout passionnante, Shannon Wright est aujourd’hui de retour avec un nouvel album intitulé ‘Honeybee Girls’, 2 ans après le vibrant ‘Let In The Light’. Après 10 années de carrière en solo, la chanteuse américaine a su s’imposer grâce à un plaisir de composer et de jouer toujours intacts. Propos recueillis lors de sa venue promo à Paris le 6 septembre dernier.
En 2007 tu as surpris pas mal de tes fans avec un album très calme qui faisait suite à ‘Over The Sun’. As-tu voulu recréer cette atmosphère sur ce nouvel album?
Shannon Wright: L’ambiance de ‘Let In The Light’? Non, pas vraiment. En général quand je compose un disque je n’ai pas de concept particulier au départ. Les choses viennent naturellement, que les chansons soient plus calmes ou énervées, ça correspond à mon état d’esprit du moment, à ce que je veux transmettre en espérant que le public aimera.
L’album s’appelle ‘Honeybee Girls’, qu’est-ce que cela signifie ?
Shannon Wright: C’est beaucoup de choses. Je pense que cela vient de ma frustration concernant la situation des femmes aujourd’hui, en tout cas aux Etats-Unis. Les choses n’évoluent pas, je veux dire qu’elles sont prisonnières de clichés, comme se faire belles, plutôt que de se trouver un but précis pour elles-mêmes. Il faut qu’elles puisent leur force avec ce qu’elles ont dans le cœur, en se libérant de ce que la société leur impose.
Une fois encore sur ton album, la plupart des chansons sont chargées en émotions, d’où vient cette inspiration ? De ton vécu ? Ou s’agit-il plus d’histoires que tu veux nous raconter ?
Shannon Wright: C’est un peu de tout… Ces derniers temps plusieurs de mes amis sont morts, donc souvent le sujet principal, c’est le sens de la vie. Beaucoup de chansons ont pour thème ‘la vie est comme un rêve, et puis ça s’arrête’. Donc quand on repense à certains moments de la vie, à certains souvenirs, on se demande : « est-ce que c’est vraiment arrivé ? » au fur et à mesure que le temps passe. La plupart de mes chansons viennent de là. J’essaie juste de comprendre ce que tout cela signifie.
Parmi les 10 chansons de l’album, ces ‘Honeybee Girls’ seraient donc le thème principal, comme l’était la lumière sur ‘Let The Light In’ ?
Shannon Wright: Je pense que c’en est une partie. Mais le thème vraiment c’est trouver des réponses à ce que j’abordais auparavant : la société, les femmes, l’amour…
Ton album se démarque également par une nouvelle approche musicale, une atmosphère différente sur des titres tels que ‘Father’ où tu insères une touche d’électronique.
Shannon Wright: Oui, j’aime essayer des choses différentes en studio. J’aime beaucoup enregistrer. Tu vois, il y a d’abord la naissance de la chanson à la maison, c’est encore une toute petite chose… Puis je la laisse de côté quelques temps, et alors je pense à l’enregistrer ; et en studio les idées fusent – particulièrement sur ce disque – et c’est très stimulant. Du coup la structure évolue. Pour ‘Father’ je voulais essayer autre chose qu’une batterie classique, quelque chose de plus froid en fait.
Comment s’est passé l’enregistrement de l’album ?
Shannon Wright: Je l’ai fait avec un vieil ami à moi, Andy Baker, avec qui je travaille depuis des années. Il vit actuellement à Taïwan, il a trouvé un travail là-bas, et une femme… qui l’a quitté ! Mais il y est resté ! Il est rentré pour rendre visite à mes parents, là il m’a appelé et m’a dit ‘Je suis là pour une quinzaine de jours, peut-être pourrait-on enregistrer un album ?’. Je lui ai dit que je n’avais que quelques chansons, mais il m’a répondu ‘allez, tu peux le faire !’. Alors j’ai écrit la plupart des titres en une semaine. C’était le bon moment parce que j’avais besoin qu’on me pousse. Parfois je travaille mieux sous pression.
Tu as choisi de terminer l’album par une reprise des Smiths, ‘Asleep’. C’est un morceau que tu joue depuis longtemps sur scène, peux-tu nous donner la raison de ce choix?
Shannon Wright: Je l’avais enregistrée une fois, en face B d’un 45 tours et j’avais envie de l’enregistrer à nouveau pour la mettre sur un album, le moment était venu avec celui-ci.
Il y a un autre sujet que je voulais aborder qui, pour moi, est un élément essentiel de ton œuvre, c’est la scène. Tout d’abord tu as déjà beaucoup tourné en France, et collaboré aussi avec Yann Tiersen, est-ce que la France est un lieu qui t’inspires ?
Shannon Wright: Oui, j’adore jouer ici. J’aime beaucoup le public ici, car j’ai l’impression ‘qu’il est avec moi’ pendant le spectacle…
Il l’est, crois-moi ! Enfin, nous l’étions, car j’ai été plus d’une fois parmi eux !
Shannon Wright: (rires) C’est très gratifiant car je ne suis pas une artiste qui joue son set séparée du public, alors quand il est avec moi, il me porte, me donne envie de me livrer plus. Si on attend juste de moi de faire mon ‘show’, alors je n’en tire aucun plaisir. J’ai besoin de me perdre avec le public, et là nous partageons ensemble ce moment qui restera ensuite un bon souvenir. Ce sont des moments très importants pour nous tous. Ca m’est arrivé en tant que spectatrice, donc quand c’est moi qui suis sur scène, je veux être aussi ‘vraie’ que possible.
On dit souvent que tu es une artiste très timide, pourtant tes prestations scéniques sont impressionnantes par leur intensité. Dirais-tu que la scène est une bonne thérapie contre la timidité ?
Shannon Wright: Je ne sais pas si on peut parler de thérapie. Je dirais plutôt que c’est ‘révélateur’. Comme si je disais, « Me voilà, c’est le vrai moi ! ». C’est une forme de liberté. Je ne me pose jamais de questions sur mon look, comme de nombreuses femmes, moi je n’y pense pas. Je me dévoile et j’essaie de partager cela avec le public. C’est vraiment un moment où on peut se laisser aller, se libérer des contraintes, des apparences… Et c’est pareil dans le public !
Je disais que tu avais collaboré avec Yann Tiersen. Les collaborations, c’est une chose que tu te verrais refaire ?
Shannon Wright: Il faut que ce soit la bonne personne, le bon projet. Ce n’est pas quelque chose que je recherche. Avec Yann Tiersen c’est vraiment arrivé par hasard. Quelqu’un m’avait donné un CD de lui, et alors que j’étais en tournée en France, je l’écoutais tout le temps. Mais je ne savais pas qui il était, mais je me sentais connectée à lui en tant qu’artiste parce que je me retrouvais dans une partie de son travail. Il s’est avéré qu’il ressentait la même chose pour ma musique. On s’est rencontré, on a dîné, parlé musique… on est tout suite devenus amis. Donc quand on a décidé de faire cette collaboration on ne se disait pas « il faut qu’on sorte ce disque », mais plutôt « essayons, et voyons ce qu’il se passe ». C’était très relaxant, il n’y avait pas de pression, et on a adoré le résultat. On avait fait ça en une semaine. C’était fun, on se réveillait, on enregistrait jusqu’au soir…
Dirais-tu que tu préfères le studio ou la scène ?
Shannon Wright: Ce sont deux choses bien différentes. J’adore enregistrer, trifouiller des sons, expérimenter… Des amis à moi m’ont dit que je devrais être ingénieur du son. Mais jouer sur scène c’est vraiment ce qui me touche. Enregistrer, c’est plus comme jouer à un jeu, c’est juste différent !
Propos recueillis le dimanche 6 septembre 2009 à Paris.
Un grand merci à Shannon Wright, Guillaume Le Collen, Philippe Couderc ainsi que toute l’équipe de Vicious Circle.
Pour plus d’infos :
Chroniques:
‘Honeybee Girls (2009)’
‘Secret Blood’ (2010)
‘Let In The Light’ (2007)
‘Over The Sun’ (2004)
L’Alhambra, Paris, lundi 12 octobre 2009 : compte-rendu / galerie photos
La Maroquinerie, Paris, Lundi 16 avril 2007 : compte-rendu / galerie photos
Festival Les Femmes S’en Mêlent, Paris, vendredi 30 avril2004 : compte-rendu / galerie photos
http://www.facebook.com/shannonwrightmusic
http://www.viciouscircle.fr/site/?q=artistes%2F40